L’été dernier, j’ai pris beaucoup de plaisir à parcourir les différents articles du magazine #Management, qui empruntaient des chemins de traverses pour poser le sujet de « changer de vie ».
Une belle escapade, sans aucun doute. Bien entendu, après un accident de vie, la réflexion que j’ai engagée dans la phase de reconstruction légitime ce type de lecture. Mais comme le rappelle une citation célèbre de l’humoriste Francis Blanche, reprise par le magazine :
"Mieux vaut penser le changement que de changer le pansement »
Autrement dit, il n’est peut être pas utile d’attendre d’avoir très mal pour imaginer « une autre voie ». Et nombreux sont celles et ceux qui le font sinon, ce type de "Une" de magazine n’aurait aucun lectorat.
Ces lignes droites qui permettent de filer à si grande vitesse, bien que cette image soit mise à mal par la saturation de zones équipées mais à trop grand trafic et bouchées, sont-elles idéales ?
Laissent-elles suffisamment de place à une réflexion personnelle approfondie, autre que celle conçue et ou héritée en un autre temps, avec une autre éducation et un autre environnement. Je n’en suis pas si sûr.
Et au-delà même, pour centrer mon propos, il n’est pas un jour sans que l’on oppose, des territoires où il fait bon vivre en ce sens que chacun a le temps de ressentir et d’exister, et d’autres où l’étouffement produit de plus en plus de burn-out, stade dépassant largement la gestion difficile du stress.
Et il n’est pas un jour sans que l’on oppose, une ruralité à la peine, "les oubliés" chantés avec succès par Gauvain Sers, et une urbanisation qui l’est tout autant, pour des raisons très différentes, mais où l’on sent bien qu’une autre réflexion pourrait permettre de tendre vers un meilleur équilibre.
C’est un cercle vicieux auquel il faut s’attaquer plus encore et différemment car il n’est pas nouveau loin de là. Notre beau pays en souffre depuis si longtemps. Des maçons creusois montrant gagner de quoi faire vivre leurs familles dans le Paris d’Haussman, en passant par « La montagne est belle » de Jean Ferrat, que n’a t-on pas dit, et surtout subi sur le sujet.
Changer de vie avec cette notion intégrée de rééquilibrage territorial pour que chacun respire n’est-il donc pas responsable, tant du point de vue humain, qu’économique, qu’écologique etc.
Beaucoup y pensent, nous dit le magazine, et peu osent.
Le magnifique ouvrage de Florence Besson aux éditions Flammarion est sur le sujet une puissante matière pour aborder le sujet avec passion et raison. Et les deux ne s’opposent pas, même si aujourd’hui encore, on est loin de l’éradication de cet antagonisme auquel on croit.
On voit tant de rêveurs quitter des villes pour mener des projets farfelus. Et voués irrémédiablement à l’échec. J’en vois dans ma campagne notamment, et sincèrement c’est assez triste. La rêverie idéaliste a ses limites.
Et d’un autre côté, tant de résistance d’un système passéiste, ne mettant aucune bonne volonté à aider celles et ceux qui veulent oser, et sortir des voies « normées », mais usées aussi. L’innovation intelligente au sens de la coopération humaine n’est pas encore le fort actuel, et il nous faut tant de « mantra » bâtis autour du vivre ensemble, de l’aide, du lien, pour sembler vouloir redécouvrir la fraternité de notre drapeau.
Je mesure aussi les difficultés de celles et ceux que l’on va appeler dans les campagnes les « transplantés », les rêveurs qui veulent donner des leçons (ce qui peut arriver et est franchement peu avisé), par opposition à la franchouillarde camaraderie, teintée de « clochemerlisme » avec toutes les solutions qui ont laissé se dépeupler ces campagnes et encombrer nos villes.
Alors, comme sur beaucoup de sujet, une grande humilité permettrait de mieux prévoir une saine évolution, plutôt que gérer des ruptures de tous ordres et passer trop de temps à changer les pansements. Et un véritable échange, partage. "Je sais je sais", chantait Jean Gabin, je sais qu’on ne sait jamais…
Comme j’en ai pris l’habitude, plus encore depuis la création de #toiledevie, j’aime à ouvrir des portes, jeter des passerelles, pour rendre possible. Donner l’envie d’avoir envie. La clé de la VIE vraie. Je laisse à d’autres, beaucoup plus qualifiés que moi, le soin de mener les études de faisabilité étant conscient que cela demande du travail, de l’investissement. Et je vois bien que ce billet n’est pas exhaustif. J’espère seulement aller chatouiller les consciences, avec un petit courant d’air à respirer.
Oui, il y a des métiers traditionnels mais clés, en souffrance aujourd’hui. Oui j’ai été ému par cet article de La Croix, que je recommande au sujet du lien représenté par les infirmiers en campagne.
Indispensables, et de plus en plus, il suffit de lire les préconisations de Myriam El Khomri au Gouvernement sur l’accompagnement du grand âge pour regarder ces murs en face : des métiers au bord de l’épuisement, mal reconnus et valorisés, des métiers manquants et pourtant sans eux... Rien que d’y penser, moi qui ai connu la ruralité solidaire qui tenait à peu près debout, j’en ai mal au cœur.
La centralisation forcée par une certaine idée rationnelle et gestionnaire de l’économie est brillante en théorie, mais on ne vit pas en théorie.
L’excès inverse n’est juste pas possible, ne serait-ce que parce qu’on manque de ressources donc j’en reviens à mon rejet des dogmes portant ce qui ne fonctionne pas pour ouvrir notre regard.
Quel bonheur de lire l’histoire de ce jeune boulanger de 19 ans, quelle bouffée d’espoir...
Il crée un lieu de vie, donne de l’emploi, maintient le service et le lien, tout cela avec l’appui de ses parents. Voilà où la légion d’honneur devrait se poser.
Personne ne viendra dire que ce métier de boulanger est fantaisiste ? personne ne viendra dire que les « tournées en campagne » ne sont pas le sang de la vie qui circulent dans les veines de nos territoires. Et tout cela par un jeune, espoir pour demain, ça fait du bien, ce souffle ….
Quelle joie de suivre ce beau métier de facteur que j’ai connu à vélo en campagne, alors que maintenant ce sont les villes qui poussent les vélos... Et avec des assistances électriques. Je retiens surtout, au-delà de l’évolution, le lien social apporté par le facteur. Cette petite émission de radio issue de mon Périgord vous en reparle. Je ne prétends pas que le métier doit être comme avant, impossible, Internet notamment a absorbé du courrier en telle masse. Mais encore une fois, autrement, en gardant ce cœur d’#humanité.
Encore faut-il accepter d’en parler, le déverrouillage d’un corporatisme dépassé est trop lent.
Nos villes replantent des arbres, il y a même des opérations d’envergure pour cela, nos campagnes plutôt bien pourvues n’ont pas été très tôt sensibilisées, cela commence.
Il en est de même pour les pesticides de tous ordres ; combien de villes arborent de fiers panneaux pour signaler qu’elles ont adopté l’élimination des pesticides.
Combien de campagnes pensent encore que c’est une fantaisie de bobos urbains. Toujours cette sacrée opposition entre les uns et les autres. Et on parle d’intelligence collective, sic. On a raison, nous en avons tant, mais par pitié ne la gâchons pas.
Je ne veux pas me cantonner pour mes exemples dans le traditionnel que j’accompagnerai d’une baguette et d’un béret. Nos territoires, nos vies valent tout de même mieux que cette image d’Epinal même si j’ai de l’affection pour elle.
Des activités nouvelles, intelligentes, peuvent être créées et viables, si notre Collectif s’y intéresse vraiment. Des activités pour changer et donner sens à sa vie.
Mais je vais tout de même me faire plaisir, en citant l’opération lancée par Le Groupe Social #SOS dans le cadre de sa réflexion engagée auprès de la Ministre de la cohésion des Territoires, avec ses bistrots. Lieux de vie, où le lien l’entraide, la solidarité, bref le #ensemble porte tout son sens.
Pour en revenir aux métiers de la terre, comme d’ailleurs les autres que j’ai cités, je ne nie en aucun cas les difficultés, ce contre quoi il faut se prémunir ; ce sont des métiers difficiles, beaucoup ne permettent pas de vivre dignement on le dit assez sans pour autant que les choses bougent vraiment.
Aussi je suis heureux et je tire mon chapeau quand je vois deux jeunes brillamment diplômés, frère et sœur, reprendre le domaine de leur parents producteurs d’alcools pour Cognac, créer une marque responsable, éliminant la pollution de la terre, diversifiant sa gamme en privilégiant la créativité et l’envie du bien vivre. J’applaudis fort, et oui, Jean Pierre Pernaud qui a pris la succession de Pierre Bonte à la télévision a raison de parler de « ces gens là »… Ils réussissent autrement.
Ou deux autres, que je connais aussi dans le Gers, tous deux autres diplomés ex urbains et redonnant un bon coup de fouet à l’apiculture, en créant notamment avec succès le stick de miel.
Et tant d’autres favorisant cette toile de vie qui m’est chère, et je pense à toute l’offre culturelle qui n’est plus l’apanage des seules métropoles. Parce que la culture ne peut pas être l’oubliée de la vie où que l’on soit, elle est trop nourricière pour l’ouverture, la tolérance, la compréhension, le partage, l’avenir.
Tout ce que demandent à corps et à cris, et d’ailleurs de plus en plus à cris, les nouvelles générations, positivant autant qu’elles le peuvent, tout ce que demandent les éreintés de la vie d’avant, etc.
Et pourtant… nous n’y sommes pas encore, « Notre route est droite (encore que) et la pente est forte »
Et des scrutins territoriaux approchants, je regarde amusé les villes tant « enviées », singer les campagnes pour offrir cette qualité de vie à laquelle chacun aspire - il y a même un classement annuel des villes et villages - , et des villages voulant au contraire continuer la course à la pseudo modernité considérée comme un échec par les susdites villes. C’est incroyable, ce manque de vision d’ensemble qui nous poursuit. Beaucoup veulent changer, c’est-à-dire pour reprendre en conclusion cette phrase célèbre issue d’un sketch de Muriel ROBIN, « couper mais garder toute la longueur » …
#Peur #immobilisme #toutetsoncontraire : piètre résultat.
Je l’ai écrit dix, vingt fois. J’aime les lieux de vie existants ou à créer, la raison d’être de ma toile de vie.
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