On parle du télétravail : et en premier lieu, réflexion de fond ou opportunisme ?
La période COVID 19, toujours en cours en phase X, a précipité le télétravail au 1er plan
des organisations de travail médiatisées, en conférant à cet enfant nouveau-né de notre siècle une maturité à laquelle il ne s’attendait pas.
"Travelling arrière ": cela fait déjà quelques années que le télétravail, pour les métiers qui peuvent être concernés (d’évidence ou pas, j’y reviendrai) balbutie au-delà des textes qui l’ont « institutionnalisé ». Je mesure ce que je dis, cela fait longtemps que des populations ciblées au travail ont eu des pratiques extrêmement discrètes sur le sujet, dans la mesure où principalement leur entreprise / leur statut / l’équipement en présence le permettait. Et il était de bon ton de ne pas faire trop de bruit sur le sujet pour laisser aller un système, dont on sentait bien les avantages, mais dont on se servait plutôt de façon opportuniste que volontarisme pour ne pas gêner un ordre établi qui ne l’avait nullement prévu (technique, organisations, mentalités et comportements).
Une loi sur le travail de plus à l’initiative du gouvernement Macron, comme réponse à une aspiration de notre temps, dans un cadre de guerre des talents, plus une invite d’intellectuels aux dirigeants avait conduit nombre d’entre eux à aborder le sujet en organisation.
Et là, profusion d’avenants de contrats, de chartes, conçus en milieu d’autorisés, officiels ou non, avec une quantité non négligeable de managers et de managés qui faisaient comme la poupée de Polnareff, qui disaient non non non non….
Ce qui explique ma qualification de balbutiante et le côté laborieux de l'avènement..
J’avoue que j’ai d’abord été inquiet en voyant de sujet pris comme une poule prend un couteau, pour reprendre l’expression populaire, puis hilare par reflexe nerveux en assistant à de multiples réunions et réflexions sur le sujet à caractère ubuesque, puis lassé par tant d’hypocrisie et d’artifices et j’oublie peut-être un stade, mais disons que cela suffira à décrire ce que j’ai vécu.
Et badaboum, la Covid attaque :
Sauve qui peut …. le télétravail se voit débarquer partout où il peut comme la solution palliative empêchant tout de s’effondrer.
Enfin, tout ce qui est compatible avec. Et là on ne finasse plus, on passe en force quitte à y laisser des plumes, nombreuses puisqu’au-delà des matériels adéquats (réseaux, postes de travail) au-delà des questions de sécurité que les hackings récents avaient rendu cruciales, on fonce, il n’y a pas le choix sinon l’ampleur de la catastrophe est sans limite.
De là, on débat et on polémique, grand sport national, même aux dernières extrémités.
Et le sujet du télétravail devient LE sujet : on y pointe ses avantages, en les exacerbant, en les parodiant :
Et on va plus loin : on sature les écrits d’émanation RH/management et on s’apostrophe avec cette élégance avec laquelle on construit aujourd’hui, c’est-à-dire non exempte de violence stupide (mais on semble aimer, alors pourquoi pas).
Je suis ravi que la Covid ait rehaussé la partie de l’iceberg
Ravi qu’un débat ait lieu en espérant que nous ayons la sagesse de faire évoluer bon nombre de modèles sans tomber dans tous les travers extrémistes dont nous sommes friands et en ayant l’intelligence d’imaginer des étapes de maturation correspondant au vécu, aux aspirations et aux contraintes que l’on s’appliquera à transformer en opportunités. A la rubrique diversité, je glisse juste ce post qui fait réfléchir :
MAIS, je reste totalement abasourdi face à un quasi aveuglement.
Mis à part quelques voix sages type Vincent Verthelot, Patrick Bouvard, Aude Amarrurtu, François Geuze, Benoit Serre, Audrey Richard, Thomas Chardin, Marie Pierre Fleury, Julien Morissson Patrick Storhaye et d’autres, qui ne m’en voudront pas de les oublier mais qui se reconnaitront car nous avons la même honnêteté derrière nos différences, et sans fausse modestie, un peu de hauteur de réflexion, d’audace et d’empathie.
Nous avons le regret de constater que cette profusion a quelque peu oublié la réalité des organisations du travail majoritaires, et que le télétravail ne concerne encore, et sans doute pour très longtemps qu’une partie de notre population.
Quid des métiers manuels, de bouche, quid des opérateurs en production, qui des personnels dédiés aux soins, quid des personnels chargés des besoins élémentaires notamment alimentaires, qui des métiers du bâtiment, des taxis et j’en oublie tellement car la liste est suffisamment longue pour trouver l’exhibitionnisme du débat tel qu’affiché un peu envahissant car eux, à ce jour ont une chance infime de côtoyer avant leur retraite le télétravail.
Non je ne suis pas passéiste. J’essaie juste d’être équitable et respectueux.
Et réaliste. Rien n’empêche de trouver de nouvelles solutions et idées pour faire évoluer le travail dans tous ses aspects, encore ne faudrait-il pas évacuer la question sous un « cache misère », qui me fait toujours penser à ma question "du pain des jeux du cirque..." Un peu de décence …… que diables à vis du si grand nombre qui ne peut "vivre" le télétravail.
C’est difficile, exigeant, je le sais, je ne suis pas, comme me l’a dit un jour un délégué syndical, un garenne de 6 semaines (expression rurale pleine de bon sens).
Mais ne prenons pas notre société comme peuplée d’imbéciles avec un progrès (reste d’ailleurs des questions en suspends à son sujet) pour certains secteurs en oubliant le fond, et tant de monde derrière ….
Ah oui, changer véritablement d’époque est compliqué et long, changer de paradigme n’est pas simple. Et vous allez me dire, le simplisme je ne cesse de me battre contre.
Eh oui, sans doute parce que mon esprit est complexe et que je me refuse à vivre un monde binaire qui n’existe pas et qu’on voudrait nous imposer. Oui, pour débattre sur tous les outils, parce que cela fait toujours avancer, non pour faire croire que c’est le graal, et jamais sans laisser de côté le fond du sujet, le plus ardu, qui ne doit pas être absent par procrastination aisée. Donc je salue les réflexions, et surtout les initiatives relatives aux mises en place de teletrail, il parait difficile d'envisager sérieusement un demain "sans".
Et puis, là aussi tous ceux qui me connaissent savent : mais notre écoute, notre empathie sincère sans tomber dans le sentimentalisme, juste parce qu’il s’agit d’humain, doit nous permettre d’être meilleurs, à tous points de vue, y compris de performance, eh oui. Enfin c’est ce à quoi je crois : il y a tant à inventer dans le travail de demain. Pas de faux fuyants ou de saturation de petits bouts de la lorgnette..
Nous méritons mieux que des débats sans fin de quincaillerie autour d'une modalité ne concernant qu'une partie de la population. Osons construire.
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